LA RESPONSABILITE

constat-amiable

une matière en pleine évolution

Depuis le droit romain il est communément admis que celui qui cause un dommage doit le réparer. 

(Article 1382 du code civil devenu l’article 1240 du CC)

Sauf que celui qui répare le dommage n’est pas toujours celui qui en est l’auteur.

Certains se souviennent en pleine crise du sang contaminé de Geogina DUFOIX, ministre de la santé, annoncer qu’elle « se sentait tout à fait responsable, mais pas coupable ».

(Journal télévisé de 20 H 00 du 31 janvier 1992)

La sagesse populaire s’était émue de cette formule, et pourtant étymologiquement, le mot « responsable » vient du latin « respondeo« , ce qui signifie « répondre de » : est responsable celui qui répare le dommage, pas nécessairement celui qui en est l’auteur.

Le droit a ainsi rendu responsable du fait d’autrui des personnes qui n’ont commis aucune faute, ni de dommages, tel l’employeur du fait de ses salariés, les parents du fait de leurs enfants, les propriétaires du manque d’entretien de leur bien immobilier, l’Administration du fait de ses agents …

(ex – Crim 2 février 2022, N° 21-82 535 – art. L 911-4 du code de l’éducation – responsabilité de l’ETAT du fait de poursuites pénales contre un enseignant pour avoir harcelé des enfants,

– T. conflit. 16 novembre 2015 N° 4036 – ou d’un accident d’un militaire à Kaboul)

L’État est venu renforcer la protection des victimes en mutualisant certains risques, par l’obligation de souscrire une assurance véhicule, habitation, RCP (…),  par l’amélioration des conditions d’indemnisation des victime ou par la création de fonds de garantie tels que : la CIVI (victimes d’infraction), le FGAO (victimes d’accident de la circulation), le FGTI (victimes d’actes de terrorisme), le FIVA (victimes de l’amiante), l’ONIAM (victimes d’accident médicaux), le SARVI (autres victimes d’infraction).

Ainsi, la loi Badinter de 1985 permet d’indemniser automatiquement le préjudice corporel des victimes d’accident de la circulation sans que la victime n’ait à démontrer une faute de l’auteur de l’accident.

(Civ II, 15 décembre 2022, N° 21-11423 – droit de la victime de demander l’indemnisation à l’assureur de l’un quelconque des véhicules impliqués)

La commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) indemnise le dommage corporel sans avoir à identifier l’auteur de l’infraction (article 706-3 du CPP)

(Civ. II, 4 juillet 2019, N° 18-13853 – la saisie de la CIVI est autonome et peut donc se cumuler avec une action indemnitaire devant le juge administratif)

Parallèlement, la victime dispose d’un droit d’action directe autonome contre l’assureur de responsabilité…,

(Civ II, 3 mai 2018 N° 16-24099 , article L 1341-3 du CC)

… n’a pas à minimiser son dommage dans l’intérêt du responsable… (Crim., 27 sept. 2016, N° 15-83309, ne commet pas de faute l’épouse qui interrompt son traitement antidépresseur prescrit par les experts…),

… mais ne peut être indemnisée deux fois d’un même préjudice.

(- Civ. II, 9 fév. 2023, N° 21-21 217, – interdit de recruter et d’indemniser la perte de revenus futurs d’un même salarié,

– Civ. II, 14 av. 2016, N° 15-16 697 – ne constitue pas une double indemnisation, le préjudice économique d’une mère qui a cessé son travail pour s’occuper de son fils handicapé qui se cumule avec l’indemnité d’assistance d’une tierce personne)

En matière contractuelle, la responsabilité est limitée à la volonté des parties. Cependant, là aussi, la loi et la jurisprudence ont renforcé les droits des victimes en protégeant le consommateur, en distinguant les obligations de moyens et de résultats, en imposant les obligations de conseil, en accordant des délais de rétractation ou en facilitant les modalités de résiliation des contrats …

(par ex. Civ. II, 19 janvier 2023, N° 20-16 490 – l’assureur sur la vie doit justifier l’envoi de la lettre d’information au souscripteur)

Autre régime de responsabilité sans faute, celui du trouble anormal de voisinage que constitue une nuisance (bruits, odeurs, encombrants…).

(Cass. III, 14 novembre 2007, N° 06 18916, rejet – haie qui cache la vue)

Le droit a distingué également la responsabilité quasi contractuelle lorsque le fait volontaire devient une obligation.  (articles 1300 et suivants du code civil)

Ainsi le gérant d’affaire qui s’engage à traiter les affaires d’autrui, doit adopter tous les soins d’une personne raisonnable.

(Civ. I, 2 fév. 2022, N° 20 – 19 728 – est responsable celui qui traite en son nom personnel indépendamment de la révélation de l’identité du maître de l’affaire)

Les régimes juridiques de la responsabilité administrative ou du secours permet également  l’indemnisation de dommages causés par l’Administration du fait de ses agents ou de ses services, en présence d’une faute, de la réalisation d’un risque, ou en prévention d’un risque par des mesures contraignantes comme le confinement lors de la crise sanitaire liée au COVID 19.

Toujours dans l’esprit d’indemniser les victimes, le mode d’indemnisation des agents publics se rapproche de dispositifs retenus par le droit privé. 

(CE, 15.02.00, Mme Bernard N° 193335, remise en cause du « forfait à pension »,

CE, 6 avril 2022, N° 453847 – le droit d’allocation temporaire d’invalidité n’est pas subordonné à la reprise de l’agent)

La responsabilité pénale est encourue lorsqu’une personne contrevient à la loi pénale et prend la forme d’une sanction (amende, prison…). 

La culpabilité du condamné est susceptible d’engager sa responsabilité civile cad son devoir de réparation sous forme de dommages et intérêts, mais peut également engager :

sa responsabilité fiscale (art. 1745 du CGI, L232 du LPF, CJCE 5.05.22 N° C-570/20)

sa responsabilité disciplinaire (CE 21.06.13 N° 345500, CC, 28.07.89 N° 89-260 DC)

ou sa responsabilité douanière, (Crim 25 sept. 2019 N° 18-84 717)

… autant de régimes autonomes qui parfois se cumulent pour de mêmes faits.

Afin d’encadrer les actions indemnitaires et éviter les abus, le Législateur a prévu de limiter les poursuites et les peines dans le temps par le jeu de la prescription (qui est en droit commun de  5 ans, article 2224 du CC, de 10 ans après consolidation en matière de responsabilité médicale, L1142-1 du CSP ou de dommages corporels (article 2226 du CC), ou de 2 ans pour la garantie des vices cachés (article 1641 du CC etc.).

(par ex. : Civ. III, 21 septembre 2022, N° 21-20433 – les panneaux photovoltaïque sur le toit bénéficient de la garantie décennale)

La personne responsable peut dans certains cas, être exonérer de sa responsabilité en cas de force majeure ou de faute de la victime.

(Article 1351 du CC,

Cass. II, 19 février 1997, N° 94-21 111 – absence de faute

Cass II, 28 mars 2013, N° 12- 14522 – faute inexcusable état d’ébriété)

La loi et la jurisprudence distinguent ces différents régimes et mécanismes de mise en jeu de la responsabilité.

Ainsi par exemple, l’accident d’un enfant sur l’aire de jeu d’un restaurant se traite sur le terrain contractuel, dans le cadre de l’article 1147 ce qui exclut les dispositions de l’article 1384 al 1 du Code Civil sur la responsabilité délictuelle.

(Cass. I, 28 juin 2012, N° 10-28492 – publié au Bulletin)

Tous ces régimes de responsabilité ont donc leurs propres règles de droit qui parfois s’excluent, s’opposent, se contredisent, se complètent, ou sous se cumulent.

(- Ass. Plén. 16 novembre 2001, N° 99-20 114 – sur l’obligation pour la victime de choisir le régime juridique contractuel ou délictuel sur lequel se fonde son action,

– Cass. II, 20 novembre 1964 – sur le bien fondé de ce choix,

– Crim 30 mars 2021 N° 20-81 516 sur l’agencement de l’action en réparation devant à la fois le juge administratif et le juge pénal

– Tribunal des conflits, 16 novembre 2015 N° 4036 – accident d’un militaire à Kaboul compétence du juge judiciaire, même si mise en cause de l’État à la suite d’une action délictuelle relative à un accident de la circulation impliquant des agents et véhicules de l’Administration)

La judiciarisation de la société impose d’être particulièrement attentif à l’évolution du droit de la responsabilité, d’être rapidement diligent dans la recherche de la preuve, ne pas se laisser surprendre par l’incompétence ou la partialité des intervenants, et de veiller au respect des grands principes de notre droit tel que contradictoire.

Par ses connaissances éclectiques des différentes branches du droit,

à la faveur
d’une analyse transversale des régimes indemnitaires

et
grâce à ses conseils éclairés,

que vous soyez auteur, responsable ou victime,

Maître Roland LEMAIRE
défendra au mieux vos intérêts.

Facebook
Twitter
LinkedIn

Login to your account